"190 ans de passion littéraire"

 

Le négrier
EAN13
9782384422043
Éditeur
La Gibecière à Mots
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

Le négrier

La Gibecière à Mots

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9782384422043
    • Fichier EPUB, libre d'utilisation
    • Fichier Mobipocket, libre d'utilisation
    • Lecture en ligne, lecture en ligne
    • Fichier PDF, libre d'utilisation
    2.49
Edouard Corbière (1793-1875)

"Un jeune capitaine négrier, que j’avais connu à Brest dans mon enfance, me
rencontra, en 1818, à la Martinique. Il se mourait d’une maladie incurable,
contractée à la côte d’Afrique. « Si tu es encore ici quand je filerai mon
câble par le bout, me dit-il dans le langage qui lui était ordinaire, tu
ramasseras quelques paperasses que j’ai laissées au fond de ma malle. C’est le
journal de ma vie de forban, écrit sur l’habitacle de ma goélette, en style
d’écumeur de mer. Tu m’arrangeras un peu tout ce barbouillage, en ayant soin
de cacher mon nom, par égard pour ma pauvre mère. C’est bien assez que je lui
aie ravi tout ce qui la consolait de m’avoir mis au monde, sans que j’aille
encore poursuivre les jours qui lui restent, du souvenir d’un garnement comme
moi. » Je ne compris que plus tard le sens de ces derniers mots.

Cinq jours après notre rencontre, mon ami négrier expira dans mes bras, chez
une mulâtresse. Quelques minutes avant d’exhaler son dernier souffle, ses
lèvres charbonnées murmuraient encore une chanson de gaillard d’avant. Il
voulait, disait-il, faire tête à la mort jusqu’au bout. Il tint parole.

On ouvrit son testament. Il me léguait son brick-goélette, superbe embarcation
sur laquelle il avait fait trois voyages à la côte. Le reste de sa fortune
revenait à sa mère. Je savais qu’il avait un frère qu’il aimait beaucoup, et
je fus surpris de ne retrouver, dans l’expression de ses dernières volontés,
aucune disposition favorable à celui-ci... Je ne voulus accepter que le
journal de mer de mon compatriote. C’est cet écrit, aussi bizarre que les
événements qui l’ont produit, que je me suis appliqué à mettre un peu en
ordre, en traversant une douzaine de fois l’Océan."
S'identifier pour envoyer des commentaires.