"190 ans de passion littéraire"

 

L'autre qu'on adorait
EAN13
9782072688201
ISBN
978-2-07-268820-1
Éditeur
Gallimard
Date de publication
Collection
Blanche
Nombre de pages
304
Dimensions
20,5 x 20,5 x 2 cm
Poids
309 g
Langue
français
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L'autre qu'on adorait

De

Gallimard

Blanche

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«Quand tu penses à ce qui t’arrive, tu as l’impression de te retrouver en plein David Lynch. Blue Velvet, Twin Peaks. Une ville universitaire, le cadavre d’un garçon de vingt ans, la drogue, la police, une ravissante étudiante, une histoire d’amour entre elle et son professeur deux fois plus âgé : il y a toute la matière pour un scénario formidable. Ce n’est pas un film. C’est ta vie.» L’autre qu’on adorait fait revivre Thomas, un homme d’une vitalité exubérante qui fut l’amant, puis le proche ami de la narratrice, et qui s’est suicidé à trente-neuf ans aux États-Unis. Ce douzième roman de Catherine Cusset, où l’on retrouve l’intensité psychologique, le style serré et le rythme rapide qui ont fait le succès du Problème avec Jane, de La haine de la famille et d’Un brillant avenir, déroule avec une rare empathie la mécanique implacable d’une descente aux enfers.
Catherine Cusset a publié une quinzaine de livres récompensés par divers prix littéraires. Elle vit à New York. Elle est traduite en seize langues.
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Commentaires des lecteurs

7 février 2017

Le looser Magnifique !

Thomas est un jeune homme brillant et magnétique. Promis à un bel avenir, il échoue pourtant systématiquement dans ses entreprises professionnelles et amoureuses. C. Cusset fait l’oraison de cet ancien ami qui mit fin à ses jours à 39 ans. ...

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8 novembre 2016

A vingt-six ans Catherine Cusset rencontre Thomas l’ami de son frère de six ans son cadet. Leur relation durera quelques mois et elle laissera place à une amitié. En 2008, Thomas âgé de trente–neuf ans se suicide. Dans ce livre, ...

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16 octobre 2016

Errances glacées

Tout a très bien démarré, une lecture prenante qui serre le coeur, 100 pages lues d'un trait ou presque et un attachement réel aux personnages. Thomas bien-sûr, mais également Catherine qui raconte la vie et la mort de son ami. ...

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4 septembre 2016

L'autre qu'on adorait

**2 m i n u t e s ****2 fois par mois, le 2 et le 22, Pascale Frey chronique un coup de cœur. ** Lire la suite de la critique sur le site o n l ...

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31 août 2016

Roman à un ami disparu

C'est l'histoire de Thomas Bulot, dit "la bulle", l'histoire d'une descente aux enfers. Thomas Bulot est intelligent, gai et élégant. Il a tout pour réussir. Il est aussi excessif en tout, procrastinateur et parfois naïf, notamment dans certaines situations au ...

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5 questions posées à Catherine Cusset qui nous parle de son livre "L'autre qu'on adorait" paru aux éditions Gallimard.
Questions posées par Laurence Bellon.
Réalisation : Ronan Loup.

Article de presse : L'Autre qu'on adorait

Marie-Laure Delorme - Le Journal du Dimanche du 14 août 2016

Avec le temps, tout revient. On la rencontre et d'emblée elle dit : "Je n'y suis pas." Ses premiers mots. En fait, elle y est comme jamais. Elle habite chaque ligne d'un roman vrai, consacré à la vie et à la mort d'un ami se mouvant sur la ligne de crête. Le brillant Thomas Bulot s'est suicidé en 2008, à 39 ans, en Virginie, et avec le temps tout revient. La romancière Catherine Cusset retrace la trajectoire d'un garçon sensible, drôle, original, accumulant les ruptures sentimentales et les échecs professionnels comme on creuse un sillon noir de plus en plus profond. Elle restitue ce qu'elle sait ; elle invente ce qu'elle ne sait pas. Elle se tend un miroir à bras raccourcis. Car c'est bien elle la narratrice, normalienne de la rue d'Ulm et agrégée de lettres classiques, qui s'interroge sur la conception française de l'échec et de la réussite. Car c'est bien elle la narratrice, camarade cruelle et généreuse passant les autres à la moulinette de son style acéré, qui s'interroge sur le poids de la culpabilité face à un suicide. Alors oui, quoi qu'elle en dise, elle y est.
Elle cherche le moment de bascule

Depuis près de dix ans, elle tentait de l'écrire, ce récit-roman du clair-obscur. Elle a songé écrire un livre sur un chagrin d'amitié, elle a songé écrire un livre sur une trajectoire cabossée, elle a songé écrire un livre sur un deuil impossible. Et puis, tout d'un coup, a surgi L'autre qu'on adorait. Catherine Cusset s'adresse directement à l'ami, entre dans sa tête, comprend sa tragédie. "Je suis devenue moins rationnelle. J'ai eu l'intuition de sa souffrance. Je ne voulais plus raconter un parcours factuel, mais tenter de me mettre à sa place. Vivre, c'est passer par le chas d'une aiguille. Je ne suis pas fataliste. Il aurait pu être sauvé."

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Elle cherche, dans son parcours, le moment de bascule. Toute tragédie est-elle une répétition du malheur? Toute tragédie est-elle un enchaînement de circonstances? Le premier grand échec, celui qui inaugure tous les autres, c'est Normale sup. Thomas Bulot échoue deux fois au concours d'entrée de la rue d'Ulm. Il n'est même pas admissible. Ses camarades, eux, réussissent. La vie reste devant lui. Il passe Sciences-Po et part à 23 ans à Columbia. Une malheureuse gaffe va être le premier grain de sable à enrayer la machine huilée. Thomas Bulot ne sait pas faire. Il se fait toujours remarquer à mauvais escient. Il en va ainsi lors d'un petit déjeuner avec les chefs d'État à l'ONU, alors qu'il est en stage au service culturel de l'ambassade de France. Il en va ainsi pour sa candidature comme professeur à Princeton, lors d'un dîner dans un restaurant avec une future collègue. Il ne possède, à proprement parler, aucun savoir-vivre.
Il s'en va vers la mort seul et entouré

L'ami déchu était un amoureux d'À la recherche du temps perdu, qu'il a choisi comme sujet de thèse. Catherine Cusset dresse un parallèle entre Marcel Proust et Thomas Bulot. Le rapport fusionnel à la mère qui attendait d'eux un grand livre. L'hypersensibilité, la jalousie dévorante, la santé défaillante, la dangereuse procrastination. Être un mondain et être un solitaire. Car c'est l'une des beautés sombres du livre. Thomas Bulot s'en va vers la mort seul et entouré. Ses amis se soucient de lui ; son amoureuse, Nora, se soucie de lui ; son père et sa sœur se soucient de lui. Mais l'une des différences essentielles entre Marcel Proust et Thomas Bulot réside dans les moyens financiers.

Thomas Bulot n'a pas d'argent et n'a pas d'assise. Sa mère est fille de concierge. La vie ne cesse de rétrécir ses ambitions. Il a besoin de travailler pour vivre. On le conteste professionnellement. Ses mises en danger sont des mises à mort. Les histoires d'amour s'enchaînent mais ne le délivrent pas. Les postes lui échappent (Princeton, Reed College après un an et demi, Wesleyan, New York University) et les femmes s'échappent (Elisa, Ana, Olga). Il finit avec un poste à l'université d'Utah, à Salt Lake City, puis, en 2005, avec un poste de professeur assistant à la Virginia Commonwealth University, à Richmond. Catherine Cusset a pensé appeler son roman "L'Amérique profonde" ou "À l'ami dont on n'a pas sauvé la vie".
L'enfant perdu d'un groupe sous cloche dorée

Le titre est emprunté à une chanson de Léo Ferré. "Avec le temps, va, tout s'en va/L'autre qu'on adorait, qu'on cherchait sous la pluie". L'auteure de Jouir a cherché sous la pluie et le soleil le vrai visage d'un ami excessif. Avec lui, tout était si drôle, tout était si triste. "Le traumatisme se situe hors du temps car il peut sans cesse être réanimé. Le temps de la souffrance est du présent continu." L'auteure narre les différentes facettes de l'Amérique, le petit monde universitaire à la David Lodge, la force destructrice du désir. Thomas Bulot : plus il désire, plus il échoue. Sa peur d'être exclu s'accompagne de sa propension à se faire exclure. Il n'est pas comme les autres. Ses amis se marient, ses amis ont des enfants, ses amis s'intègrent dans la vie professionnelle. Lui reste l'homme du bas-côté. Tout laisse ici deviner la trace d'une génération choyée et d'un milieu cultivé. Les portes du paradis s'appellent Normale sup et la Terre promise se nomme l'Amérique. Il est l'enfant perdu d'un groupe sous cloche dorée.

L'écrivaine introduit "l'ombre d'une corne de taureau" (Michel Leiris) dans un roman autobiographique empreint d'une courageuse culpabilité. Qu'est-ce que rater, qu'est-ce que réussir? Thomas Bulot a toujours eu le sentiment d'échouer car il échouait par rapport aux autres. La narratrice ­Catherine, double de l'auteure, a six ans de plus que Thomas Bulot. Ils ont eu une liaison avant de devenir amis. Il lui rend un jour visite en Bretagne. Elle projette un livre sur l'histoire de ses amitiés et lui fait lire le passage le concernant. Il en est profondément blessé. Avec le recul, elle écrit : "J'ai transformé ta vie en un fil chronologique dont j'ai ôté toute substance pour la juger à l'aune du succès en suivant des critères purement sociaux." Thomas Bulot se rebelle contre son portrait. Il va ainsi faire d'elle un meilleur écrivain. Dans L'autre qu'on adorait, Catherine Cusset saisit son "être poétique" de manière bouleversante. Elle parle de son rapport à la littérature, au cinéma, à la musique. Ses plus grandes amours. Ses plus grandes vérités. Thomas Bulot était malade. Sa paranoïa, son complexe d'abandon, son incapacité à adhérer à la réalité. Il aurait sans doute pu être sauvé, si on avait diagnostiqué plus tôt sa bipolarité. L'autre qu'on adorait est aussi un roman vrai sur la maladie mentale. Il est d'autant plus difficile d'être dans l'altérité que l'autre est éloigné de la norme. La littérature est affaire de nuances. Tout ici souligne la différence entre fragilité et faiblesse, sensibilité et sentimentalisme, réussite et beauté. Vie intérieure et vie extérieure.
Une vie intérieure avec de petites ailes brisées

Thomas Bulot aimait ce que tout le monde aime. Lire, rire, draguer, voir ses amis, voyager. Il aurait souhaité avoir l'approbation de son professeur, Antoine Compagnon, mais il montrait à chaque fois son pire visage. Il était le plus intelligent, il est devenu le plus marginal. Les meilleurs d'entre nous ne sont pas ceux qui réussissent forcément. Le roman a une dimension politique. Comment on existe quand on ne travaille plus, comment on est considéré quand on échoue, comment on est traité quand on n'est pas dans la norme? Après avoir lu le livre que la narratrice voulait lui consacrer, faisant de son parcours une succession d'échecs et de ruptures, Thomas Bulot l'avertit : "Tu sais, Catherine, les gens ont quand même une vie intérieure." C'est cette vie intérieure qui se déploie ici de toutes ses petites ailes brisées. Catherine Cusset a aussi voulu un moment intituler son roman "Avec le temps". Mais non, car avec le temps tout ne s'en va pas, tout revient cingler le cœur. L'auteure n'a pas écrit un livre de deuil. Elle a écrit un roman de mémoire sensible en ­refaisant le chemin à l'envers, main dans la main, avec sa conscience en alerte. On lui en sait gré : elle a construit avec son écriture de brise-lames un abri littéraire à cet ami qu'on adorait.

© Le Journal du Dimanche

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