"190 ans de passion littéraire"

 

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9 septembre 2013

Entre érotisme et exotisme, sexualité et sensualité

Elles se prénomment Albane, Mademoiselle Beauvert, Claudine, Diane, Eve, Faustina, Gwendoline, Isabelle, Isis, Joséphine, Marcelle, Meg, Odile, Oxana, Patricia, Petra, Rose, Séverine, Tiffany et Xavière.

Ils s’appellent Baptiste, François-Maxime, Germain, Ghuncha Gul, Guillaume, Jean-Noël, Ludovic, Nathan, Orion, Philippe, Quentin, Tom, Victor et Zachary.

La jacassante place d’Arezzo les réunit. Les habitants de ce quartier huppé de Bruxelles reçoivent tous une lettre anonyme contenant le message suivant : " Ce mot simplement pour te signaler que je t’aime. Signé : tu sais qui. "

A partir de cette trame romanesque, Eric-Emmanuel Schmitt nous emmène aux confins de l’amour sous toutes ces formes : brutal, sensuel, romantique, érotique, fantasmagorique, saphique... Conçu comme une partition de musique où les volatiles vocalisent, construit comme un huis-clos, bâti comme une pièce de théâtre, ce roman-fleuve fait s’entremêler toutes ces destinées, qui se croisent, s’attirent, se désirent ou se rejettent.

Initialement, le romancier pensait écrire une encyclopédie sur l’amour. Au fil du temps, celle-ci se transforma en roman choral, symphonique. Tous les personnages incarnent une de ses formes. L’auteur ne porte aucun jugement sur ses protagonistes, mais les regarde évoluer avec tendresse.

Il explore le désir et l’érotisme, la sensualité et la sexualité, l’être, le mal-être et le paraître, la quête du bonheur et de l’harmonie. Il sonde notre pluralité et nos ambiguïtés. Un petit bréviaire, tordant, accompagne ce gros mille-feuilles savoureux. L’auteur déclare qu’avoir vécu trente sexualités fut jubilatoire. Son sourire malicieux apparaît en filigrane à travers les pages. Celui du lecteur l’accompagne.

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Une Allemande (presque) comme les autres

Tallandier

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8 septembre 2013

Angela Merkel, une chancelière normale

S’il y a un livre que François Hollande devrait lire, c’est bien cette biographie d’Angela Merkel. Bien écrite, très documentée sans être fastidieuse pour un lecteur français, elle est très, très intéressante.

La personnalité d’Angela Merkel s’est façonnée autour de trois composantes déterminantes : elle est fille de pasteur, physicienne et a grandi en Allemagne de l’Est. Le premier point n’est sans doute pas le plus important. Angela Merkel est chrétienne mais sans ostentation. En 1991, elle est Ministre de la condition féminine et sait prendre une position sur l’avortement plus libérale que celle préconisée par une CDU très conservatrice. Elle a alors 37 ans et rentre à cette occasion dans la lumière politique.  En tant que physicienne, elle a une approche très pragmatique de la réalité et cherche réellement à comprendre ce qui se passe plutôt que d’appliquer une grille de lecture et d’analyse idéologique. Enfin Allemande de l’Est. C’est peut-être le plus important pour comprendre son parcours. Le socialisme, le bilan globalement positif du communisme, elle en a fait le tour dès sa jeunesse. Et au moment de la chute du mur, qu’elle n’imaginait pas si rapide, elle comprend très vite qu’il n’y aura pas de modèle ni de statut particulier pour l’Allemagne de l’Est, que l’unification est en marche et que le modèle de l’Ouest tant politique qu’économique l’emportera. Ce passé communiste explique aussi qu’elle a su tisser des liens avec les Russes, dont elle parle la langue, ainsi qu’avec les anciennes « colonies » soviétiques comme la République tchèque, la Hongrie et même la Pologne (pour une Allemande ce n’était pas gagné), ce qui confèrent à l’Allemagne un poids politique que l’on n’avait pas vu venir.

Rien ne disposait cette jeune femme, ni belle ni coquette, à devenir chancelière. On se demande même pourquoi elle est entrée en politique. Sans doute l’envie de peser sur la réalité, de jouer un rôle dans cette Allemagne qui a spectaculairement réussi son unification. En cours de route, le goût du pouvoir lui est venu et ne l’a plus quittée. C’est cela aussi que l’on découvre à la lecture du livre de Florence Autret. Une intelligence vive, une capacité à attendre le bon moment et un sens de la réalité qui confine au cynisme. Elle sait circonvenir ces rivaux, ou introduire une tierce personne pour brouiller les cartes.  La façon dont elle s’est emparée du pouvoir est un modèle du genre. Sa main n’a pas tremblé pour tuer Helmut Khol, son père politique, et s’imposer comme leader de la CDU.

Ce que l’on retient de cette lecture aussi, c'est le rôle considérable joué par le parlement et par la Cour constitutionnelle de Karlsrhue. Il s’agit de véritables contre-pouvoirs, dont en France nous n’avons pas la culture. Angela Merkel ne fait pas ce qu’elle veut. La nature parlementaire du régime l’autorise à se rendre au Budenstag où elle passe un temps considérable pour « tenir » les parlementaires de sa coalition.

Le livre se termine sur l’Europe. Le récit des négociations entre les exécutifs français et allemands en pleine crise est passionnant et l’on mesure à quel point les vues de la chancelière, placide et pragmatique, se sont imposés à tous, malgré les résistances françaises. Si les Européens, à l’occasion de cette crise, ont pris la mesure de la prépondérance allemande, on comprend à la lecture de ce livre que la personnalité d’Angela Merkel y est pour beaucoup.

Cette femme venue de Prusse a su s’imposer à l’Ouest et  dans un monde politique dominé par les hommes, mener une coalition, faire face à la crise économique et aux pressions européennes. Tout cela sans mouvement de menton, sans la morgue d’une Thatcher, sans les yeux de biche d’une Eva Perron.

Une chancelière normale, alors ? Sans aucun doute. Mais quel talent !

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8 septembre 2013

Moins que zéro

En 2009, Sacha Sperling avait 18 ans et publiait son premier roman, " Mes illusions donnent sur la cour ", récit d'une errance pré-adolescente et de ses premiers émois érotico-narcissiques avec son meilleur ami. À l’époque j'avais été vraiment touché et impressionné par cet ouvrage, qui connut un succès mérité, et son auteur (fils de Diane Kurys et d'Alexandre Arcady) fut même comparé à Francoise Sagan ! En 2013, que reste-t-il de ce quart d'heure wharolien de célébrité et surtout quel a été le prix à payer par le jeune homme pour avoir levé le voile sur les us et coutumes de ses camarades? C'est l'histoire de son nouveau " roman ", ouvertement inspiré par l'intrigue de " Moins que zéro " de Bret Easton Ellis. Cinq ans après le succès de son premier livre, Sacha est donc de retour à Paris après un long exil à Los Angeles. Il retrouve ses amis qui ont peu changé. Sexe, drogues, soirées dans d'immenses appartements vides et interrogations existentielles entre deux rails de coke jalonnent toujours leur quotidien. Mais certains semblent avoir mal tourné, comme ce Quentin qu'il connaît depuis le CP et qui joue maintenant les proxénètes. A part ses parents qui le poussent à reprendre l'écriture, beaucoup de ses proches lui en veulent pour les avoir jetés en pâture, et aussi pour avoir " réussi ", au sens où l'entend cette génération, à savoir notoriété médiatique et gains financiers. À leur contact, peu à peu, Sacha se sent de nouveau envahi par une immense solitude et commence à développer des attitudes paranoïaques et schizophréniques quand il rencontre la troublante et secrète Mona, dont il va tomber amoureux pour son plus grand malheur...

Après le roman de sa vie, Sacha Sperling réussit à créer un nouveau genre, le roman sur le roman de sa vie ! Mais ici l'errance reste vaine, sans portée. Certaines tournures de style sont intéressantes et, par moments, on est ému par ces héros qui rêvent de pureté tout en passant leur temps à se détruire ; à la longue, cela finit par lasser. Trop d'ego, trop d'argent, trop d'excès. L'univers du génial Bret Easton Ellis a certes beaucoup inspiré les auteurs depuis 30 ans mais s'y risquer aujourd'hui implique pour un jeune auteur de ne pas s'y laisser enfermer. Sacha Sperling semble gâcher son talent, et il n'en manque pourtant pas. Alors, on attend impatiemment son roman de la maturité.

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5 septembre 2013

Cynique et corrosif

C’est le mois de juin, une quinzaine de personnes ont été conviées sur un toit d’hôtel parisien. Tous ne se connaissent pas. Le soleil se couche sur fond de poncifs, réflexions météorologiques et tentatives de classement social à peine dissimulées. Mais le temps commence à se faire long, et les absents ont toujours tort, alors pourquoi ne pas critiquer l’hôtesse de la soirée ? On parle là de Marguerite, qui a voulu faire cette surprise à Paul, une soirée d’anniversaire quatre mois après la date, mais qui ne sait pas mentir. Paul ce soir est en survêtement devant un match de rugby, et il est impossible de le faire sortir. Tandis que sa meilleure amie dévoile à toutes ses connaissances la rigidité, les manies alimentaires et les mille névroses de Marguerite, celle-ci tente d’attirer Paul hors de sa tanière soumettant sans le vouloir son couple moribond à un séisme dont ni l’un ni l’autre ne maîtrise les conséquences. De l’autre côté, sur le toit, l’alcool a propulsé la soirée dans un de ces maelstroms que seule permet la fiction.

Car manier la fiction, ça, Maria Pourchet sait le faire. Donnez-lui une nuit, deux unités de lieux, une dizaine de personnages, il ne lui en faut pas plus pour vous ciseler une comédie contemporaine qui en dit autant sur les déboires du couple que sur le jeu des apparences sociales. À la parution de son premier roman, " Avancer ", l’année dernière, cette brillante écrivaine de trente- trois ans reconnaissait le dessein de faire rire. Avec ce deuxième titre, Maria Pourchet a dépassé le stade de l’intention sous-jacente : " Rome en un jour "_ _semble avoir été écrit avant tout _pour_ faire rire. Autant de cynisme et de corrosion, de burlesque et de comique de langage, c’est rare. De fait, à bien des égards, le roman_ _évoque les plus grands succès du théâtre filmé. Même agilité dramatique, même traits forcés jusqu’à la caricature, parfois. Maria Pourchet dégomme tout sur son passage, et elle dispose de la meilleure des armes de destruction massive : le langage, qu’elle emploie avec une précision et une endurance impressionnantes. Force le respect notamment la façon dont elle dépoussière une pratique littéraire vieille comme le monde, celle d’interpeller le lecteur, le convoquant lui aussi au cœur de cette mascarade sociale.

Mais est-ce possible que Maria Pourchet soit victime de son intelligence ? Voilà la question qui nous chiffonne. Parce qu’en refermant cet objet littéraire parfaitement huilé, qui s’achève comme une nouvelle sur un chute inattendue, ultime pirouette de l’aisance narrative de l’auteure, on regrette qu’un style aussi maîtrisé n’ait pas servi à faire naître en nous des émotions. Les personnages de ce double huis-clos sont davantage des figures de style que des alter ego. À moins que ce soient sur les codes de la comédie de mœurs, en les exacerbant pour mieux les parodier, que Maria Porchet ait voulu tirer à bout portant…

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5 septembre 2013

Danton, Hugo, Churchill ou les trois fauves

A la manière de Stefan Zweig dans « Trois maîtres », Hugo Boris  croque dans « Trois grands fauves » les silhouettes de Danton, Hugo, Churchill. Trois figures au destin hors norme, au tempérament de fer, à l’énergie sans faille. Le révolutionnaire à la peau vérolée qui périt sur l’échafaud, l’homme de lettres opposant de Napoléon III, le vainqueur d’Hitler.

Pas de longues analyses circonstanciées ici mais des chapitres nerveux et resserrés servis par une plume brillante et réjouissante. En choisissant des épisodes emblématiques : Danton lors de la mort de son épouse puis  à la Conciergerie, Hugo à Jersey puis de retour d’exil, Churchill sur les champs de guerre d’Afrique du Sud  et à Paris en 1940 à la veille de la reddition, Hugo Boris affine par touches ses portraits et les personnalités prennent épaisseur et densité. Il est là dans la pleine maîtrise de son talent et « Trois grands fauves » est un régal de lecture.

Lire aussi [le coup de cœur de Bernard Lehut](http://www.onlalu.com/site/le- critique-invite/) sur ce livre

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